Les fêtes de fin d’année

Nicolas KOREICHO – Janvier 2008

Déception et promesse

« Penche-toi sur ton passé, répare ce que tu peux réparer, et tâche de profiter de ce qui te reste. »
Philip ROTH

Les « fêtes » de fin d’année résonnent comme un bilan, une jauge de l’état de nos vies. Elles ont cette particularité de permettre que l’on observe, de leur point de vue, de cette sorte de palier d’évaluation, avec l’œil neuf et le regard usé de cette période de fin et de commencement, où l’on en est.
Cela est dû à la rencontre du passé et de l’enfance, avec Noël, et du futur et de l’âge adulte, avec le nouvel an.
C’est la coïncidence de l’espoir d’un Noël plein de promesses avec la désillusion de la répétition crainte de l’année nouvelle, de la joie toujours déçue des cadeaux si « l’on a été sage » avec le bilan sans cesse inachevé car on ne l’a pas été assez.
Ces deux événements ont aussi une réalité historique et théologale très puissante pour la civilisation et à ce titre sont un rappel et une parenthèse de joie (« foi »), d’amour (« charité »), d’advenir (« espérance »).
Il y a derrière ce décembre mortifère ponctué de joie et de crainte mêlées quelque chose du paradis perdu, pour toujours. Et dans l’ombre de ce janvier que les jours augmentant commencent à porter quelque chose de la culpabilité, corde éternelle de l’enfance, vibrant encore.
L’impression de vide laissée par cet entre-deux années vient aussi de ce que l’on se sent accroché à ce fil qui va de l’exaltation d’une vie qui serait toujours Noël – en laquelle l’autre répondrait naturellement à cette invocation, pulsion d’appel – à ce poids de la mort qui vient de l’année sans cesse finie et qui nous rappelle l’inéluctable.
La difficulté et l’intérêt de la vie – et la joie si l’on en use – se poursuivant quand même, c’est que notre vérité, la beauté de l’autonomie et de la liberté, se trouve précisément entre ces deux absolus, naissance et mort. Voilà tout le plaisir de la vie où l’on peut construire notre corps érigé et renoncer, chaque chose en son temps, à l’alitement obligé.
Essayer de réparer ce qui peut l’être, de retrouver les bons moments, de rendre heureux ceux dont nous sommes responsables, de s’habituer à une forme de solitude, sans isolement, de s’entourer de la beauté, d’être bon avec les gentils, de se tenir loin des méchants, de respecter la vie, les plantes, les animaux, les humains, l’eau, de regarder ce qui brille, et qui palpite, et qui scintille, et qui est beau de l’enfance encore. Penser, rêver, approfondir, faire ce qui est bon et qui fait du bien, parler, pleurer et rire.

Nicolas KOREICHO – Janvier 2008 – Institut Français de Psychanalyse©

34RL1H3 Copyright Institut Français de Psychanalyse

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