Monstres 2

Nicolas Koreicho – Janvier 2025

Giuseppe Cesari, dit Chevalier d’Arpin, Persée sauvant Andromède, 1594-95, Piazza Accademia di S. Luca, 77, Rome

Sommaire :

Le monstre en patientèle

Norme – Normalité
Communautarisme
Les normes
La question des limites


Le monstre en patientèle

Pour le patient, être mal, souffrir, être ou rester en souffrance – paquet perdu –, doit tout d’abord équivaloir, d’une part, à considérer le « monstre » enfermé en lui-même, tout d’abord abstrait et inconscient, puis concret et conscient dans ses effets, cependant non maîtrisé et agissant, et d’autre part, à établir les liens qui existent entre les deux, pour pouvoir sinon accueillir du moins examiner ce monstre intérieur, incompris mais familier pourtant.
Dans un même mouvement, patient et psychanalyste, par l’entremise de lieux communs, de manifestations analysables pour l’un, interprétables pour l’autre, se doivent d’apprivoiser, et, par la compréhension de la rencontre de ces deux dimensions, c’est-à-dire, plus exactement, de ce qui peut se comprendre de l’inconscient tout puissant et de ses symptômes, maîtriser cette sorte de monstre, qui fait l’incomplétude, la souffrance, la répétition, le pulsionnel, et de le dompter, de le domestiquer, ou, à tout le moins, de le rendre supportable sinon meilleur.

Pour le patient cela peut dans un premier temps faire l’effort de comprendre qu’avec ce monstre apprendre à vivre est essentiel, le reconnaître, s’en faire presqu’un ami, puis entrer dans l’idée d’un monstre acceptable, puis dans un monde meilleur, à la maison, en le Moi – d’où l’idée de domestiquer –, jamais imaginé peut-être et qu’il s’agira de retrouver, d’en reconstituer les motions les plus folles, les plus contradictoires, les plus ambivalentes, par le biais des scènes infantiles, sexuelles, traumatiques, de son propre théâtre.

Plus communément, lorsque la symptomatologie est par trop consolidée et, peut-être, paraît insurmontable d’avoir répété de si importants dégâts aussi difficiles à réparer qu’ils sont familiers, tant le sujet tient à ses symptômes, ce peut être d’accompagner le patient dans la normalité, c’est-à-dire susceptible d’adaptation – au sujet, à l’objet –, et dans la perspective de recouvrer une bonne santé psychique, socle de toute vie animée, jusqu’à, pourquoi pas, un travail vers l’activité, l’amour, l’amitié, la sublimation et ses vocations[1] ou bien, plus humblement, un effort vers un devenir ordinaire, sans souffrance insupportable pour le sujet ou pour l’objet.

« Primum non nocere »
Hippocrate, 410 av. J.-C.

Norme – Normalité

« Être normal, c’est aimer et travailler » Freud

La norme, subjective, est néanmoins éclairante singulièrement dans la mesure où le lexème (cf. infra) nous donne une information très utile. En effet, il ne s’agira pas d’une norme fondée sur un jugement de valeur ou de technicité (le normé), mais une norme objective qui renvoie à l’usage commun[2] de ce qu’il est advenu du terme qui, de son côté, fait l’objet d’un consensus de la part des personnes qui l’emploient dans la littérature. Ainsi l’idée de permettre l’appréhension de la « norme » comme étant bien décrite dans l’histoire des idées selon un référent partagé, d’une part, et, d’autre part, l’idée que le terme est exactement pourvu d’un sens commun qui donne, à la manière d’une boussole, le sens des mots, des choses et des personnes lui confère cette fois le sème d’un éminent repère.
C’est d’ailleurs l’analyse du discours qui permettra au psychanalyste de décrire symptômes et courants pathologiques en fonction de systèmes de règles et de concepts qui, à leur tour, vont permettre de caractériser les phrases d’un texte[3] inconscient, c’est-à-dire organisées logiquement, en une syntaxe s’opposant ainsi à des « phrases » présupposées idéologiquement, juxtaposées de manière tronquée et erronée, ainsi qu’il en est des multiples impostures utilisant à tort certains termes de psychanalyse en ignorant la logique des ensembles descriptibles. Dès lors, les ensembles ainsi organisés pourront proposer une sémantique psychanalytique cohérente, par opposition à des phrases « orientées » sur le plan théorétique.

Les psychanalystes dignes de ce titre s’insurgent contre le wokisme et sa tentative de normalisation[4] extensive, promu par des minorités tyranniques menaçantes – et qui n’existent que par cela – racialiste, genriste[5], déconstructionniste[6], diversitaire, décolonialiste[7]…, en faveur desquelles nous pouvons faire au passage allusion aux multiples « thérapies » et « psychanalyses » dont les « thérapeutes en quelque chose »,  « psychopraticiens », « praticiens en psychothérapie », « experts en santé mentale », « thérapeutes » formés dans une « e-université », etc. qui fleurissent sur l’inculture, la précarité intellectuelle et le défaut de castration, outre la négation de l’inconscient[8] freudien, ainsi que dans l’irrespect des parcours de travail et d’effort pour être reconnus, et, en tant que de besoin par l’État, redevables d’une éthique et d’une déontologie.

Selon l’étymologie, à partir du XIIe siècle, norme est emprunté du latin norma « équerre », puis « règle, loi », et, par suite, type, état, comportement qui peut être pris pour référence ; modèle, principe directeur qu’on tire de l’observation du plus grand nombre. Norme esthétique, morale, juridique. Définir une norme. S’écarter de la norme.
La norme consiste en psychanalyse à comprendre le développement, à partir des socles de la constitution de la personnalité, déterminés avant tout par le plan affectif, outre les deux topiques freudiennes[9] déterminant toute la discipline, l’Œdipe[10], le narcissisme[11], la castration[12], les grands pôles d’organisation psychique clinique déclinant tous les concepts psychanalytiques et les trois grandes catégories psychopathologiques scientifiques, auxquelles nous ajouterons les états limites. Ainsi en est-il :
de la perversion, qui est le modèle de la dénégation de la castration, et, tout naturellement, du déni de l’Œdipe ;
de la névrose, qui est le prototype du refoulement de la castration, et conséquemment, de la fixation sur l’Œdipe ;
de la psychose, qui est le prototype de l’impossibilité conceptuelle de la castration, et, subséquemment, qui interdit tout accès à l’Œdipe.

La norme c’est aussi le réel. La « réalité » du réel est, contrairement à la doxa lacanienne, et conformément à 5000 ans de civilisation et à 3,8 milliards d’années d’évolution, l’atome, l’ADN, la gravitation, la physique, la paléobiologie, la mécanique quantique, la relativité restreinte, la matière, le « roc biologique » freudien, le corps et, pourquoi pas, l’inconscient.
Le réel lacanien concerne une acception restrictive du terme, puisqu’il correspond à un seul moment du traumatisme psychique et, plus précisément, selon lui, « quand on se cogne », ce qui est bien différent du large et ordinaire syntagme qu’on trouve dans les dictionnaires et les académies.
Ainsi, l’idée – l’idéal – de normalité en psychanalyse n’est pas l’absence de symptômes mais la capacité pour le sujet de se dégager de la répétition et d’accroître ses capacités développementales pour accéder à un compromis satisfaisant entre soi et le monde, c’est-à-dire entre ses exigences pulsionnelles et les contraintes de la réalité et de soi et de l’autre. Cela ne signifie pas qu’il lui faille se conformer à la réalité et au monde, mais il lui faudra à coup sûr se dégager de la conformité ancienne, archaïque, aux périodes et aux moments traumatiques qui ont empêché le Moi d’élaborer un établissement, à partir d’une capacité de penser les nouvelles donnes, souvent à venir encore, de sa vie et, dès lors, de développer des solutions satisfaisantes – non pervers, non psychotiques, non psychopathiques, dans la prise en compte des limites – pour réajuster ses propres instances pulsionnelles – un rétablissement – bien distinctes de celles de l’enfant.
Cette ambition est simplement la norme de l’adulte qui, par-delà transfert et névrose de transfert et dans la délivrance de la satisfaction du masochisme primaire, de la culpabilité primaire et des pulsions de destruction régulièrement trouvées dans la résistance à l’ « aller mieux », se met à vouloir acquérir des éléments de connaissance nouvelle qui relègue les motions pulsionnelles et libidinales de l’enfant à l’arrière-plan du désir de vie dans l’idée de redessiner ses relations à soi et aux autres.

Communautarisme

Plus vous adhérez à des communautés, plus vous vous éloignez de votre inconscient, et plus vous vous éloignez de vous-même. L’inconscient est une dimension éminemment individuelle. L’inconscient collectif, comme chacun sait, n’existe – dans un emploi erroné – que pour décrire, incomplètement et faussement, une « psychologie » collective.
Comme indiqué supra, plus vous vous rapprochez des communautés normalisatrices[13] et qui correspondent, à grands traits, au marxisme, à l’existentialisme, au structuralisme, au wokisme – vous observerez le principe exemplaire s’agissant du wokisme : le dogme simplificateur dominant-dominé avec son sinistre cortège de sous-dogmes constitués par des minorités frustrées et tyranniques déconstructionniste, genriste, racialiste, diversitaire, décolonialiste –, plus vous vous enfermez dans une dynamique pulsionnelle (non résolue : la jouissance, cette « petite mort », qui est absence de désir, de plaisir, de développement relationnel et personnel. Un simple réflexe) dans la mesure où vous vous adonnez à l’idée du bon droit communautariste, c’est-à-dire de la prétendue légitime excuse brun-rouge-vert s’arrogeant l’inculture comme étendard et la précarité intellectuelle comme principe, et plus vous laissez ainsi libre cours (si nous pouvons ainsi dire) au refoulé et aux horreurs – passages à l’acte, sectarisme, terrorisme d’abord « intellectuel » – qui en découlent.
C’est la même chose mutatis mutandis avec les refuges associatifs de psychopathologies transformées en communautés instituées aisément localisables : perverses, addictives, psychopathiques, psychotiques, « limites », maquillées précisément alors en souffrances auto-justificatrices, sous l’apparence de délires confortables mais mortifères.

Les normes

Elles s’opposent à la norme. Le spectacle de la destructivité, dans l’histoire, dans l’événement, dans les mentalités parfois, représente cette incompréhension pulsionnelle. Son exhibition en spectacle est un déni de l’inconscient. Pensons à la grande messe wokiste à l’occasion de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques. Le wokisme s’appuie sur des principes revendiqués par de petits maîtres bien-pensants progressistes politiques, radiophoniques et télévisuels subventionnés : inculture, grossièreté en gants crème et faiblesse intellectuelle dans les programmes rééducatifs bien gardés dans les administrations, y compris médiatiques, et à l’Assemblée : e. g. la demande amusante d’interdiction de l’expression « travail au noir », et la demande cocasse de suppression de diffusion de la chanson de Michel Bergé Le paradis blanc. En exemple d’exploitation du wokisme par certaines associations : un violeur OQTF qui se dit en transition de genre. C’est une solution conseillée par certains avocats pour que les délinquants puissent rester sur le sol de France à l’aide du recours genriste, rentable pour la satisfaction internationaliste d’aucuns (Dieu que ce pronom indéfini leur sied !).
Deux citations et une référence, illustratives, dans les registres :

Littéraire,

« En quelle année où sommes-nous mon âme
Tout peut changer mais non l’homme et la femme
Tout peut changer de sens et de nature
Le bien le mal les lampes les voitures

Même le ciel au-dessus des maisons
Tout peut changer de rime et de raison
Rien n’être plus ce qu’aujourd’hui nous sommes
Tout peut changer mais non la femme et l’homme »
Louis Aragon

Psychanalytique,

« Il m’apparaît que c’est l’observation de la différence des sexes qui est au fondement de toute pensée aussi bien traditionnelle que scientifique. […] Il m’est apparu qu’il s’agit là du butoir ultime de la pensée, sur lequel est fondée une opposition conceptuelle essentielle : celle qui oppose l’identique au différent, un de ces themata archaïques que l’on retrouve dans toute pensée scientifique, ancienne comme moderne, et dans tous les systèmes de représentation. »
Françoise Héritier, Masculin/féminin

Scientifique,

« La détermination sexuelle a lieu dès la fécondation lors de la mise en commun du patrimoine génétique des gamètes mâle et femelle déterminant le sexe génétique de l’embryon. Cette détermination sexuelle va permettre l’engagement vers la voie de la différenciation testiculaire (XY) ou ovarienne (XX) »
Maëlle Pannetier et Éric Pailhoux, La différenciation du sexe

À partir d’une extension du genrisme dans la remise en cause des normes humaines, certains revendiquent leur appartenance à des races animales : je suis une licorne (au-delà du symbole : terme pris à la lettre : délire simple) ; je suis un écureuil, je suis…

Nous préfèrerons Colette, et la sublimation dans l’esprit d’écriture :

« Née d’une famille sans fortune, je n’avais appris aucun métier. Je savais grimper, siffler, courir, mais personne n’est venu me proposer une carrière d’écureuil, d’oiseau ou de biche. Le jour où la nécessité me mit une plume en main, et qu’en échange des pages que j’avais écrites on me donna un peu d’argent, je compris qu’il me faudrait chaque jour, lentement, docilement écrire, patiemment concilier le son et le nombre, me lever tôt par préférence, me coucher tard par devoir. »
Colette, Journal à rebours (1941)

La question des limites

Bien entendu, la question qui se pose lorsque l’on évoque la norme, et afin qu’il ne s’agisse pas que d’une projection idéique, est celle des limites[14].
Une des seules limites au désir est la capacité d’accepter la possibilité de ne pas pouvoir l’exaucer.
L’inconscient, nous le savons, ne connaît ni temporalité ni contradiction – c’est sa condition : il est intemporel et anhistorique -, appréhendable facilement à tout le moins dans ses manifestations, figurées, travesties, élaborées secondairement, à condition que dans l’interprétation (c’est entre autres le travail de l’analyste cependant que le patient, de son côté, est censé entre autres analyser) les limites soient toujours rappelées, à un moment ou à un autre, dans le quotidien du patient dans son rapport à la réalité, au quotidien, au bon sens, aux règles de l’analyse.
Ce n’est que dans la réalité de ce qui est, de ce qui se fait, du devenir des corps, dans ce que l’on admet de son propre corps et du corps de l’autre, du bien et du mal, que le choix (et la différence) entre le désir – le plaisir – et la pulsion – la jouissance – apparaît comme fondamental et sa possibilité essentielle, sine qua non du rapport au monde, sans quoi le monde vous qualifiera de monstre.
Ainsi, devant l’infinité des perversions forclusives, des gouffres psychotiques, des solutions psychopathiques, des errances wokistes et leurs sinistres cortèges de symptômes, de maladies, de crimes, de souffrances et de douleur, c’est la nécessité de considérer la question des limites, de la norme, de la normalité, de la réalité des êtres et des choses qui guérit de la loi du sang, du meurtre et de l’inceste, au bénéfice de la loi réelle et de la Loi symbolique.
C’est une sorte de refoulement compréhensif[15] – « un homme, ça s’empêche » – de ces motions pulsionnelles qui nous permet d’être des névrosés plus ou moins acceptables.

Les limites pour le patient, peu à peu devenant analysant, et pour le psychanalyste, eu égard à son idée du dispositif transitionnel à construire entre le sujet et le monde dans l’apprentissage des limites, sont par celui-ci posées grâce à la formulation d’un certain nombre de conditions, règles ordinaires de la psychanalyse et de son cadre qui permettent au patient d’éviter les passages à l’acte, lesquels, comme chacun sait, sont des obstacles à la pensée. On ne doit pas tout faire de son fantasme, pas tout dire de son délire, pour le patient, et on ne doit pas tout dire de son interprétation, pour le psychanalyste, afin, last but not least, que celui-là, le patient, comprenne que son salut est dans le respect du processus analytique et des règles de l’analyse pour laisser à celui-ci, l’analyste, le loisir de conférer aux symptômes morbides et aux transferts leur signification, dès lors délivrée du conditionnement imposé par les motions du passé sexuel-traumatique-infantile du sujet.
Faute de quoi, le masochisme et son retournement en les termes humains du Ça, atemporel, anhistorique, amoral, laisseraient libre cours aux pulsions du violeur, du terroriste, du pervers : du mal et du fou[16], de celui qui ne respecte ni les corps, ni la mort. Le monstre c’est ça, rien d’humain ni d’animal, le monstre est le Ça.

« C’est la partie la plus obscure, la plus impénétrable de notre personnalité. [Territoire de] Chaos, marmite pleine d’émotions bouillonnantes. Il s’emplit d’énergie, à partir des pulsions, mais sans témoigner d’aucune organisation, d’aucune volonté générale ; il tend seulement à satisfaire les besoins pulsionnels, en se conformant au principe de plaisir. Le ça ne connaît et ne supporte pas la contradiction. On n’y trouve aucun signe d’écoulement du temps. »
Sigmund Freud, Le Moi et le Ça

C’est peut-être une question pour nous toujours à l’ordre du jour que celle qui doit être référence en psychopathologie psychanalytique, ce pour quoi le patient vient vous voir, c’est-à-dire comprendre un corps en souffrance et saisir la chance d’un esprit apte à reprendre la conquête du Moi, afin de mettre entre les parenthèses obsessives du corps ancien, ce colis perdu, égaré, oublié, pour le remettre au monde.

Nicolas Koreicho – Janvier 2025 – Institut Français de Psychanalyse©

Suite de : Monstres 1


[1] Nicolas Koreicho, La sublimation, mars 2022, en ligne, Site de l’IFP, https://institutfrancaisdepsychanalyse.com/la-sublimation/

[2] Communément appelé « Le Bon usage »

[3] Pour Freud, l’inconscient fonctionne comme un texte, à l’encontre de Lacan pour lequel – ce qui signale son incompétence sémiotique – l’inconscient est structuré comme un langage.

[4] Cf. le processus appelé normalisation en Tchécoslovaquie entre 1968 et 1989 par la dictature socialiste de l’URSS : Cadrage – Purges – Années de plomb – Censure – Élimination des intellectuels

[5] Jacques Lacan, « Position de l’inconscient », Écrits : « Du côté de l’Autre, du lieu où la parole se vérifie de rencontrer l’échange des signifiants, les idéaux qu’ils supportent, les structures élémentaires de la parenté, la métaphore du père comme principe de la séparation, la division toujours rouverte dans le sujet dans son aliénation première, de ce côté seulement et par ces voies que nous venons de dire, l’ordre et la norme doivent s’instaurer qui disent au sujet ce qu’il faut faire comme homme ou femme. »

[6] Vieille lune soixante-huitarde

[7] Le résultat c’est, par le biais d’une dépersonnalisation des individus, l’enfermement dans un statut social militant et, plus grave, l’empêchement pour eux d’accéder à leurs motivations inconscientes les plus brûlantes qui s’ensuit. Par conséquent, l’autonomie intellectuelle devient impossible, et la fermeture psychique auto-référentielle selon le dogme dominant-dominé devient la règle. Dès lors, les personnes, pour se soumettre à la doxa séparatiste, et pour dénier à quiconque le droit de les dominer intellectuellement, à l’occasion d’une nouvelle anti-psychiatrie, anti-œdipe, anti-capitalisme, anti-bourgeois, anti-patriarcat, etc. revendiquent d’appartenir à des groupes « psys » spécifiques non psychiatrisables (HPI, TDAH, bipolaires, Asperger…), d’humains dominés « souffrant de handicaps sociaux ».

[8] De nouveau, et comme toujours, la psychanalyse est attaquée – ou récupérée – comme dans les années 70. L’idéologie woke considère qu’elle est masculiniste et patriarcale (Freud, Lacan sont des hommes), sexuelle et sexiste (piliers de la discipline : Narcisse, Œdipe), tournée vers elle-même (individuation, travail sur soi), raciste et transphobe (pas de théoricien noir, chinois, LGBT…), et le wokisme invente les écopsychothérapie, psychosomatoanalyse, psychanalyse inclusive, psychothérapie relationnelle, psychanalyse féministe, dasein-analyse, médecine symbolique, queer-analyse (!) qui s’ajoutent aux anciennes psychanalyses toutes éphémères (Psychanalyse existentielle, du soi (Winnicott), interpersonnelle (Sullivan), humaniste, intégrative, relationnelle (!), appliquée… Il existe – si l’on peut dire – plus de 40 types de psychanalyse. Il n’y en a en réalité qu’une : la psychanalyse.

[9] Nicolas Koreicho, Inconscient, Préconscient, Conscient – 1ère topique, Mai 2021, en ligne, Site de l’IFP, https://institutfrancaisdepsychanalyse.com/inconscient-preconscient-conscient-1ere-topique/ ; Ça, Moi, Surmoi – 2ème topique, Mai 2021, en ligne, Site de l’IFP, https://institutfrancaisdepsychanalyse.com/ca-moi-surmoi-2eme-topique/

[10] Ibid.

[11] Ibid.

[12] Pour le garçon, le rôle de la castration est d’instaurer la loi du tiers qui modère la toute-puissance narcissique de l’enfant puis l’assure de sa protection. Après la dépression qui suit la castration, le fantasme consiste en « Je suis capable, mais c’est interdit », cependant que la fille se dit « C’est possible mais c’est interdit ». Toutes les perversions proviennent d’un défaut de castration.

[13] Communautés de pensée liées quelquefois au politique communément admises :
1900 -1910 : phénoménologie (Husserl)
1910 -1920 : pragmatisme (Peirce, James, Dewey)
1920 -1930 : existentialisme (Heidegger, Sartre)
1930 -1940 : philosophie analytique (Wittgenstein, Russell, Quine)
1940 -1950 : herméneutique (Ricœur, Gadamer)
1950 -1960 : structuralisme (Lévi-Strauss, Barthes)
1960 -1980 : post-structuralisme déconstructionniste (Heidegger, Derrida, Foucault)
1980 -1990 : néo-pragmatisme (Rorty, Jacques)
1990 -2000 : réalisme spéculatif (Meillassoux)

[14] Nicolas Koreicho, La question des limites en psychanalyse, octobre 2021, en ligne, Site de l’IFP, https://institutfrancaisdepsychanalyse.com/la-question-des-limites-en-psychanalyse/

[15] Le fantasme est la rétribution que nous payons au refoulé.

[16] Vaine l’idée d’excuser les criminels sous prétexte de folie, l’irresponsabilité pénale étant contraire à l’imposition, thérapeutique, des limites par la sanction : « n’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes » et, quand même, dans que « demeure punissable » la personne atteinte au même moment d’un trouble de même nature ayant seulement « altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes ».

 34RL1H3   Copyright Institut Français de Psychanalyse

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