Nicolas Koreicho – mars 2018
La supervision, un apprentissage de trois principes :
Un principe de modestie
La psychanalyse et la psychothérapie sont des métiers de l’artisanat. La supervision également. C’est la confection d’une triple relation. Superviseur et collègue, collègue et patient, superviseur et patient. A ce titre le praticien débutant a l’obligation de se référer à un collègue ayant davantage d’expérience pour contrôler et évaluer sa clinique, sans devoir imposer ses techniques. Il ne doit pas lui transmettre ses idéaux ni modeler le praticien à son image.
L’émergence de la supervision pour les psychanalystes et les psychothérapeutes est assez ancienne et les enjeux quelquefois vitaux des séances invitent le superviseur à faire appel à une large culture psychopathologique, psychiatrique et psychanalytique, sorte de boîte à outils conceptuelle, afin d’adjoindre à l’exercice de la supervision la lecture des structures et tendances de la personnalité, auxquelles superviseur et collègue sont confrontés et auxquelles ils doivent se référer pour en reconnaître les fonctionnements.
Un principe de discrétion
Le terme de discrétion est pris au sens de séparation. C’est ce qui permet de développer à la fois l’intimité et son respect. Ainsi on doit pouvoir favoriser le potentiel créatif du supervisé. Il s’agit pour cela de résister à son propre narcissisme de celui qui s’entend penser sa supervision sans s’interdire le travail sur soi. Il faut ne pas se focaliser sur la transmission de règles techniques ou de réponses attendues. Simplement mettre en mots, et choisir le bon moment pour les proférer, les inconscients de chacun des protagonistes, collègue et patient, y compris pour contredire. Trop d’empathie nuirait à l’objectivité de l’exercice.
Une jeune collègue ne peut s’empêcher de me demander comment je ferais en telles circonstances d’analyse d’une femme maltraitée. Malgré la difficulté de l’enjeu, je lui propose d’observer au plus près possible ses propres tendances de refus ou d’acceptation et d’en extraire ce qui pourrait permettre à sa patiente de comprendre la situation et ses attendus et ainsi de se libérer de ce qui conditionne la patiente et elle-même. Je l’interroge sur ses propres réticences. J’interprète par la même occasion en la renvoyant à sa propre expérience et lui fais part de mon interprétation (remise en question de ses premières impressions).
Un principe de délicatesse
Analyser le contre-transfert du collègue vis-à-vis de son patient et en profiter pour analyser son propre contre-transfert vis-à-vis du collègue moins chevronné afin de transmettre une analyse du savoir être bienveillante.
Pour ce faire, il est important pour le superviseur de ne pas employer la règle de silence et d’écoute flottante. Sans pour autant obliger, mais inciter, sans non plus demander, mais accueillir. Le superviseur devra s’employer à user de toute son attention pour apprécier les signes, les symptômes du discours de l’autre, l’autre supervisé, l’autre patient, sans oublier les siens propres, qui donnent toutes indications sur la marche à suivre tout en n’oubliant pas l’acquisition nécessaire de la reconnaissance des tendances et des structures (psychopathologie, psychiatrie, psychanalyse) des personnalités en question.
Nicolas Koreicho – mars 2018 – Institut Français de Psychanalyse©
∴
Supervision 1. Principes en supervision