Marilyn

Nicolas Koreicho – Août 2023

« La nuit dernière, je suis encore restée éveillée toute la nuit. Parfois je me demande à quoi sert le temps de la nuit. Pour moi, il n’existe presque pas, et tout me semble n’être qu’un long et affreux jour sans fin. Enfin, j’ai essayé de profiter de mon insomnie pour être constructive et j’ai commencé à lire la correspondance de Sigmund Freud. En ouvrant le livre pour la première fois, j’ai vu la photographie de Freud et j’ai éclaté en sanglots : il avait l’air très déprimé (cette photo a dû être prise peu de temps avant sa mort), comme s’il était mort en homme désabusé… Mais le Dr Kris m’a dit qu’il souffrait énormément physiquement, ce que j’avais appris dans le livre de Jones. Mais je pense avoir raison aussi, je fais confiance à mon intuition car je sens une triste lassitude sur son doux visage. »
Marilyn Monroe

« Seuls quelques fragments de nous toucheront un jour des fragments d’autrui. La vérité de quelqu’un n’est en réalité que ça, la vérité de quelqu’un. On peut seulement partager le fragment acceptable pour le savoir de l’autre. Ainsi on est presque toujours seuls. »
Marilyn Monroe

« L’amour et le travail sont les deux seules choses vraies qui nous arrivent dans la vie. »
Marilyn Monroe

« Je ne sais pas qui je suis, mais je suis la blonde. »
Marilyn Monroe

Georges Barris, Marilyn Monroe’s final photo shoot, Santa Monica, Juillet 1962. Crédit Georges Barris©

Marilyn Monroe, de son vrai nom Marilyn Mortensen[1], est morte comme serait morte une divinité tragique, à la fois dans la vraie vie[2], selon la conséquence d’un réseau de circonstances jouées par « des hommes manipulateurs et des femmes opportunistes » – une destinée – et morte en scène, mise en lumière par elle, pour le mythe – un destin -, par l’autre et pour l’autre toujours absent, sauf la nuit de sa mort pendant laquelle, subitement, un grand nombre de personnes se sont intéressées à elle.
Jusqu’à sa dernière heure, pourtant, c’est « Marilyn Monroe » dont on s’est préoccupé, pas d’elle.
La particularité du désir, celui qu’elle a suscité sans cesse, est qu’il ne fonctionne que dans l’absence de l’objet désiré. Désirer de de-siderare : l’étoile qui manque. Mais quel était la nature de son désir à elle ? « Être merveilleuse », disait-elle. Contentez-vous de cela.
Elle était trop belle pour les autres, mais ce n’est pas le « trop » que l’on entend aujourd’hui et qui veut dire « vraiment ». Elle était trop belle car son œuvre et son art existaient d’abord de manière manifeste dans et par sa beauté et son sex-appeal et parce que les autres ne voyaient que ceci. Trop, car c’était pour elle une question de survie que de se reconstruire dans et par-delà un narcissisme originel, et que celui-ci, par le biais de son image – dans un premier temps : son image était un refuge, non déceptif –, soit reconnu, puisque ses parents n’ont fait que détruire, avant même qu’il existât, dans un développement ordinaire de l’Œdipe, son Moi, et le cœur de celui-ci, c’est-à-dire son narcissisme originel (rien à voir avec la pathologie du même nom ni avec le vocable ordinaire), l’un des deux socles de la personnalité, avec l’Œdipe (idem), si tôt anéanti.
Père non connu, parti quelque temps après sa naissance, mère partie depuis toujours dans la maltraitance et la folie. Pour Marilyn, ce que l’on appelle les objets primaires n’ont existé que sous leur pire aspect, nullement, donc. Elle vécut au sein de douze familles d’accueil, pour l’abandon compulsif – malgré son sourire, un redoutable bouclier – souvent[3]. Elle : jetée au milieu des flots des projections et des profiteurs.
Elle a été aimée, quelquefois, mais à côté, ce qu’elle savait bien – elle était toujours en retard : savait-elle qu’elle voulait qu’on l’attende, qu’elle aurait voulu être attendue, c’est-à-dire désirée puisque le désir naît de ce que l’on n’a pas ? –, et ce qui était aimé, hélas pour elle, était son image, ou son empathie, rarement son intelligence, cependant qu’elle avait beaucoup plus à apprendre à ces célébrités, artistes, intellectuels, gouvernants qui avaient possédé son corps, sa notoriété, une image à peloter, un trophée dont jouir : « L’autre prend votre corps pour illustrer des fantasmes dont vous n’êtes pas, la tendresse en moins. » disait-elle.
Trop belle également car cette quête d’un Moi idéal devait demeurer inassouvi et la mener en enfer. La façon dont les hommes ont abusé d’elle – treize avortements/fausses couches/GEU/andométriose : elle n’a pu obtenir qu’elle fût mère – et sur quoi les femmes ont fermé les yeux, sans cesse, est à proprement parler infernale puisque, hormis dans son image peaufinée comme un tableau dont on ne voit pas la fin, dans ses lectures, dans ses notes, peut-être en partie dans son analyse[4], ils ne lui ont pas permis qu’elle trouve le bien de sa vie, qu’elle se trouve et se rétablisse.
Elle finira par prendre ce courant de l’abus d’elle-même, à travers les médicaments et les relations à corps perdu, et en mourra, c’est peut-être là que se trouvait, en partie, sa responsabilité, de n’avoir pas su résilier ce que l’on avait fait d’elle. On ne l’y aida point.
Une résilience a pourtant existé pour elle, difficile à réaliser puisque menaçant l’image qu’elle s’était construite. Mais c’est comme si sa quête du bien, et du bien qu’elle était et qu’elle voulait trouver, reconnaître et développer, s’annulait par la violence des hommes et la rivalité (et l’admiration) des femmes qui avaient croisé sa route. Il s’agissait pour eux de jouir, ou de s’approprier un peu, au passage, de cette quête absolue du bien et du beau que Marilyn avait dans sa construction, en une sublimation effective, de l’image étourdissante qu’elle montrait de ce désir, qu’à tort ils croyaient à eux destiné.
En effet, l’attirance sexuelle que Marilyn provoquait et l’envie qu’elle suscitait, qu’elle développait à l’envi dans la manière, unique, qu’elle avait de mettre en valeur et de transformer cette énergie d’Éros en pulsion de vie, n’était pas axée sur le sexe à proprement parler mais en représentait une ouverture, un possible chemin vers une amitié, vers une affection qu’elle attendait éperdument, ne l’ayant jamais eue avec ses parents, c’est-à-dire, nous y insistons, son œuvre cinématographique et photographique en témoigne, une forme particulière de sublimation.
Cependant, disait-elle avec humour, « Je peux vous l’affirmer ici et maintenant. La gloire est capricieuse. Elle a ses avantages, mais aussi ses inconvénients. J’en suis consciente. Je t’ai connue, gloire ! Adieu. »
Cette sublimation, ambivalente, à la fois artistique et spirituelle, qu’elle a développée avec ce talent[5] singulier, s’exprimait – tout le monde s’y est engouffré – dans la puissance esthétique et sensuelle de sa personnalité mais aussi, dimension sombre de la brillante star qu’elle était, dans la sacrificialité de sa personne, porteuse et actrice, était-elle, de la culpabilité des autres, ce qui en fait, en ce sens, une personnalité christique.
Il s’agissait pour elle non seulement de se faire reconnaître, mais, plus encore, de se faire renaître, avec les autres. Co-renaître. Re-co-naître. De mauvaises rencontres en miroir aux alouettes, elle n’y parvint pas.
Une enfance en souffrance répétée (multiple familles de rencontres et de séparations plus ou moins traumatiques qu’il fallait réinvestir à chaque fois ou s’en faire accepter), mariée à 16 ans une première fois, c’est-à-dire pour retrouver un re-père, et/ou un « re-mède », à tout le moins une certaine sécurité.
Malheureusement, et c’est là comme une répétition de l’absence, du vide, auxquels elle aura été toute sa vie confrontée – et dans l’abandon ultérieur répété de la part des hommes – comme au manque essentiel, l’être en souffrance, c’est-à-dire égarée, perdue, en l’absence de parents qui auraient pu l’aimer inconditionnellement : « L’enfance de chacun se rejoue tout le temps » disait-elle. Hélas pour elle.
Cette naissance avec l’autre, elle la répétait[6] compulsivement et d’abord en donnant. En donnant aux hommes quand ils lui demandaient puisqu’elle pensait à chaque fois qu’ils allaient l’aimer, elle, d’une profonde amitié d’abord.
Marilyn – un prénom qui marquera le monde, comme les prénoms qui sont aujourd’hui, littéralement, adorés : Jésus, Marie –, une mère orpheline, une sainte sans sanctuaire, une martyre sans calendrier, quelque chose d’une divinité, maternelle et érotique, Marilyn était patriote.
Le fameux et à peine ambigu « Happy Birthday, Mr. President » du 19 mai 1962 pour l’anniversaire de John F. Kennedy, sa tournée dans les camps de soldats en pleine guerre de Corée lors de ce février 1954, où, sur scène, elle mourait littéralement de froid en lamé moulant, pour redonner de l’énergie aux GIs, de nombreux moments de sa vie sont une ode à l’Amérique, mère patrie non démente celle-ci, pensait-elle. Elle alla, selon certains courageux témoignages, jusqu’à coucher avec les deux frères Kennedy[7], et en même temps (les démocrates : l’éthique ? Les principes ? D’abord profiter ? La mort au tournant), pour ne pas les contrarier, ne pas les blesser, pour ne pas risquer d’affaiblir, par personnalités interposées, le pays. C’est cohérent.
Marilyn aimait les animaux dans le martyre desquels elle se reconnaissait. Son jeu de grande souffrance dans The Misfits[8] est un sacrifice complet de son image de la blonde écervelée et soumise de Bus Stop à l’avantage de sa révolte sincère pour la défense des chevaux sauvages, les mustangs, massacrés à l’époque pour servir de nourriture aux pets, les animaux domestiques des familles américaines.
D’ailleurs, sa démarche, sa présence était animale. Quiconque l’a vue entrer dans une pièce, sur un plateau, dans un jardin, témoigne de ce climat très particulier qui s’instaurait sitôt qu’elle pénétrait dans un espace empli de gens. Un silence, une qualité vibratoire, un chuchotement, un arrêt, imperceptible, sur image. Une autre célébrité faisant le même effet à qui en a été le témoin : Johnny, lorsqu’il entrait sur un plateau, au milieu des loges, dans un couloir, traversant une foule, laissait un sillage de sidération semblablement animal. Un autre point commun entre eux, était que souvent, avant de se produire, ils vomissaient, puis, soulagés et transfigurés, brillaient sur scène, forts et fragiles.
Sa vie était plus que d’une blessure narcissique, puisque de narcissisme, paradoxalement, elle n’avait pas été pourvue, étant littéralement partie de rien ni de personne, car elle ne fut pas aimée tout-à-fait, et elle n’a disposé pour se faire elle-même que de son travail : « Faire en sorte que la routine de mon travail soit plus continue et plus importante que mon désespoir. »
Il s’agît donc d’une construction narcissique singulière – dont elle ne put bénéficier d’emblée – et qu’il s’agissait de créer sans cesse, construction qu’elle ne devra qu’à elle-même, grâce à une grande intelligence, à une grande beauté, à une sincérité et une intégrité qui la condamnaient concomitamment à incarner un être sacrificiel.
Elle disait aussi : « l’enfance dure toute la vie ». L’impossible dépassement pour elle de sa condition affective lui coûta la répétition sans cesse réitérée des gouffres, et de l’angoisse y afférente, de son enfance.
Un père qui ne la reconnaît pas, une mère qui ne l’aime pas. Seule au monde, comme plus tard elle fut au figuré isolée par sa beauté et son intelligence, avec comme enjeu la construction à réaliser d’un monde original, unique. Elle échoua donc pendant toute son enfance et son adolescence dans ces multiples familles ersatiques. C’est dire qu’elle a vécu itérativement un abandon dont la puissance traumatique fut renouvelée durant toute la partie de sa vie qui aurait dû être édificatrice et, au contraire, qui fut par-là déconstructrice. C’est grâce à cette beauté et cette intelligence qu’elle parvint malgré tout à devenir, après Marie, la seconde femme la plus célèbre de tous les temps, mais au prix d’un véritable chemin de croix.
Dans Bus stop[9], elle incarne Cherie, une « inspiration divine », qui rêve de partir du minable cabaret des alentours de Phoenix en Arizona où elle chante pour rejoindre Hollywood et ses promesses de lendemains meilleurs. Jo, primaire et enthousiaste cow-boy, réussit à la convaincre de partir avec lui, ce qu’elle finit par accepter pour l’amour que le personnage lui portait.
Le grand repère fut pour elle d’abord sa propre image qu’elle croyait – et, en une sorte d’hallucination de désir, espérait a minima voir dans les yeux des hommes -, qu’elle devait réinvestir indéfiniment non pas pour plaire à ces hommes sexuellement, dans le regard desquels elle voulait en fait percevoir une amitié, cette affection, cette reconnaissance qui lui avaient tant manquée, quitte à développer une hypersexualité, qui la maintenait, mais aussi pour tenter de s’apercevoir dans ces miroirs aux alouettes que le regard des hommes lui tendait.
De la même manière, du côté du manque maternel cette fois, elle ré-investit compulsivement une génitalité (sexualisation par défaut) non comblée par l’objet primaire (« pri-mère »).
Dans l’absence de ces regards du père et de la mère, la seule issue pour elle fut dans un premier temps de construire sa propre image de manière suffisamment explosive (la beauté et la provocation, toutes deux peaufinées avec une intelligence pragmatique et une grande sensibilité – et comme une candeur d’enfant – afin qu’elle pût masquer une détresse intérieure archaïque provenant de ces deux manques initiaux.
C’est comme si Marilyn avait désinvesti l’intellection (à commencer par le langage articulé : elle ne pouvait prononcer sans une intense émotion et avec difficulté les débuts de phrase, en particulier les M), malgré une vive intelligence qui la fit lire quelques auteurs fameux, parfois difficiles, se rapprocher de bons intellectuels, prendre des cours de théâtre (Actors Studio), pourtant au faîte de sa gloire, entreprendre une analyse, malheureusement pour elle, avec de médiocres analystes, dont le principal, Ralph Greenson, à la fois psychiatre et, se disant tel, psychanalyste – a commis ce qu’on considèrerait aujourd’hui comme une première faute professionnelle : prescrire et analyser en même temps – et se montra mal avisé dans la maîtrise des enjeux de son contre-transfert envers Marilyn qui était, en un moindre mal, consolée dans la famille de son analyste, ce qui compensait partiellement l’absence d’amour simple en sa simple personne et qu’elle retrouvait là mais aussi, d’une certaine façon, ce qui l’enfermait dans une dernière famille d’accueil.
Nous pouvons à présent considérer la mort violente de Marilyn comme conclusive – inéluctable pour ceux que cela arrangeait – de l’état et du contenu de ce qu’il reste du dossier des dernières heures de l’événement, en même temps que l’absence d’assassin direct – et unique – identifié. Cependant, la déflagration causée par sa mort reste, à ce jour, à la lettre, à la fois sacrificielle et déniée. Compte tenu de sa dépressivité et de son usage des toxiques, il fut aisé à l’époque de convaincre le monde entier, la presse en particulier, de son suicide « […] par surdosage, volontaire ou accidentel » (et, dans ce cas, de qui ?), contraire pourtant aux coups de téléphone, aux rendez-vous, aux projets, aux témoignages[10] relatifs aux tout derniers jours de sa vie et à ses toutes dernières heures. Tout était prêt, elle allait être heureuse.
Elle aurait, selon toute vraisemblance, été en quelque sorte effacée[11] de la société d’alors, consécutivement aux menaces qui pesaient sur les frères Kennedy, N°1 et N°2 des États-Unis, que pût être révélé leur comportement, spécialement en lien avec les relations physiques (et sexuelles) qu’ils avaient avec les femmes en général et Marilyn en particulier[12], ainsi que, incidemment, eu égard aux échanges qui se déroulaient en sa présence malgré l’état, sensible, du monde et de l’Amérique d’alors (Essais nucléaires, Missiles, Cuba, Castro), cependant pas comme on l’entend habituellement du seul geste d’un seul responsable.
Selon une dernière et complète enquête (cf. infra : Marilyn Monroe Mystery : The unheard tapes) la responsabilité de sa mort pourrait[13] être « partagée » entre plusieurs personnes : John et Robert Kennedy, président et procureur général des États-Unis[14], dont Marilyn, malgré leurs étroites relations, a reçu du jour au lendemain de la part de Bobby, immédiatement avant sa mort – une très forte dispute s’en est suivie entre elle et lui -, l’interdiction définitive de tout contact avec eux, ce qui l’a « […] blessée, terriblement blessée. » et lui laissa l’impression de n’avoir été « qu’un morceau de viande », John Edgar Hoover, homme lige du FBI, Ralph Greenson, le psychiatre-« psychanalyste », trop intéressé sur trop de plans, Peter Lawford, l’organisateur des parties fines pour les Kennedy, Arthur Jacobs, son public relations, Eunice Murray, au comportement particulièrement duplice, d’autres encore de l’entourage de Marilyn, toutes responsabilités délayées cette nuit-là, en un étrange et opportun commun accord, décelable dans l’inexactitude ou les correctifs des déclarations de ces hommes et de la gouvernante, du chauffeur et des employés d’ambulance, du pilote d’hélicoptère, des agents du FBI, du personnel médico-légal[15].

La nuit de la mort[16] de Marilyn, la participation de différents protagonistes – la chronologie est brouillée, incertaine, laissée volontairement dans le flou, le puzzle de la temporalité événementielle, des allers et retours des visiteurs, sont demeurés incohérents ou tus – est révélée par les silences et/ou les contradictions. La circulation des multiples personnes présentes à un moment ou à un autre, cependant que Marilyn était encore en vie et pendant son agonie[17], reste encore incomplète et imprécise, sans que l’on ait trop cherché, à cette époque de grande influence, à approfondir.
À partir, cependant, pour ce qui est de la densité personnelle de l’héroïne de cette histoire et sans se limiter à ceux-là, d’éléments dissociés (narcissisme exalté et environnement déceptif, quête d’un amour propre et amour d’une sexualité détachée – « Un baiser est une gourmandise qui ne fait pas grossir. » -, image sublimée dans le mythe et image abîmée dans la vie, incertitude et confiance en sa séduction en scène, intelligence brillante et absence de reconnaissance intellectuelle, urgence de montrer ses talents et retards devant les demandes de l’autre), s’organisant malgré tout dans une construction assumée tant bien que mal et sur le point de s’embellir et de se libérer encore, les constituants de sa personnalité n’ont été approchés que par objets (intellectuels, artistes, célébrités, livres, pensées, notes, chants et danses) interposés. Morte en scène[18], nourrie non d’affection mais de barbituriques, de narcotiques, de somnifères et d’alcool, de n’avoir pu être nourrie de l’affect indéfectible d’un père et d’une mère, aimée, comme il devrait toujours se devoir, inconditionnellement.

Nicolas Koreicho – Août 2023 – Institut Français de Psychanalyse©

Ce texte représente, à la lumière des derniers éléments de l’enquête, un approfondissement de notre ébauche d’octobre 2012.

Références :

Marilyn Monroe, Fragments, Seuil, 2010.

France-Culture (Radio), Michel Schneider, Moi Marilyn, Les Grandes Traversées, Juillet et Août 2012 :
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-moi-marilyn?p=2

Netflix (Télé), Emma Cooper, Marilyn Monroe Mystery : The unheard tapes (Le Mystère Marilyn Monroe : Conversations inédites), 2022 :
https://www.netflix.com/fr/title/81216491


[1] De manière révélatrice, on se trompe sur le nom, « Baker », qu’on lui attribue et qui vient du métier du premier mari de la mère de Marilyn, donné rapidement à l’occasion d’un malentendu sur le passeport du géniteur. Dans notre article, nous exceptons le prénom « Norma Jeane » qui l’enferme dans cette enfance.

[2] Dans la nuit du samedi 4 août 1962, à son domicile du 12305 Fifth Helena Drive à Los Angeles, Californie.

[3] Ayant été agressée sexuellement, à l’âge de huit ans, la femme de l’homme responsable de ces gestes ne supporta pas l’accusation et la gifla violemment. Elle bégaya incessamment depuis ce jour.

[4] Tous ses analystes se sont fait piéger, avec cependant moins de zèle que le psychiatre Greenson, tant son image (imago : en biologie désigne le stade imaginal – terminal – de la créature) les éblouissait.

[5] Du vieux français talent « inclination, disposition, volonté, désir » (XIIe siècle), du latin médiéval talenta, pluriel de talentum « inclination, penchant, volonté, désir » (XIe siècle) et du latin classique « balance, poids ; somme d’argent », du grec talanton « une balance, une paire de balances », d’où « poids, poids défini, tout ce qui est pesé ». Dès lors, se rapproche du poids, de l’investissement que l’on met dans les choses.

[6] Hormis sur scène ou lors de ses séances analytiques, Marilyn bégayait depuis l’enfance.

[7] Les frères Kennedy, en toute arrogance, et selon les témoignages de leur entourage, avaient des « mœurs dissolues ». Il est difficile d’imaginer qu’ils ne soient pas impliqués dans la fin tragique de l’actrice. À peu près tous les documents, photos, enregistrements dans lesquels ils apparaissaient avec Marilyn furent saisis et détruits. Son dossier à la CIA fut presque totalement expurgé.

[8] John Huston, The Misfits (Les Désaxés), États-Unis, 1961.

[9] Joshua Logan, Bus stop, L’Arrêt d’autobus, États-Unis, 1956.

[10] Georges Barris, dernier photographe de Marilyn, trois semaines avant sa mort, sur la plage de Santa Monica, révèle le coup de tonnerre qu’a provoqué sur lui l’inimaginable : « Ce fut l’événement le plus effroyable de toute ma vie […] Elle ne voulait pas être enterrée, car elle avait peur des vers de terre. » ‘‘France-Culture, Moi Marilyn, Épisode 11’’, et sur la planète l’annonce de la mort de Marilyn.

[11] Le détail des circonstances de sa mort, la disparition de photos, de notes et journaux intimes, l’identité des personnes présentes, leur rôle précis n’ont pas été, jusqu’à aujourd’hui, élucidés.

[12] Les Kennedy, Robert en particulier, craignaient notamment que Jimmy Hoffa (responsable du tout puissant syndicat des camionneurs co-dirigé officieusement par la mafia) ne révèle les turpitudes des gouvernants démocrates avec l’actrice.

[13] Emma Cooper, Marilyn Monroe Mystery : The unheard tapes (Le Mystère Marilyn Monroe : Conversations inédites), Netflix, 2022.

[14] Le procureur général des États-Unis Robert Kennedy était en ville cette nuit-là et a pris un hélicoptère pour l’aéroport vers 3h.

[15] Sur l’improbable déroulement des faits et leur étrange chronologie : Peter Lawford, à partir de la fin d’après-midi s’inquiète comme jamais de son état physique. Arthur Jacobs, le public relations de Marilyn aurait été prévenu à 22h30 que « quelque chose de grave s’était passé chez Marilyn Monroe » ce dont témoigne sa veuve. Il serait allé chez Marilyn à 23h (témoignage de son assistante). Eunice Murray gouvernante de Marilyn et du Dr Greenson dit s’être aperçue de la mort de Marilyn à 3h. Elle aurait prévenu Ralph Greenson qui serait venu aussitôt. Les secours ont été appelé à 4h25 du matin (archives de la police). Entre 22h30 et 4h25, un grand nombre de personnes sont allées chez Marilyn. De nombreuses anomalies ont depuis lors été relevées (rôle et témoignages des protagonistes, objets, pièces, documents, chronologie, toxicologie, autopsie).
Les éléments concernant la position du corps ne correspondent pas non plus entre les témoins, celui-ci ayant été déplacé un grand nombre de fois.

[16] Officiellement : « suicide par surdose médicamenteuse ». A priori, surdose de barbituriques administrés par lavement. Syndicat des médecins généralistes (en ligne) : https://lesgeneralistes-csmf.fr/2014/03/07/histoire-marilyn-monroe-les-mysteres-de-son-autopsie/. « Bizarrement, dans le cas de Marilyn, nous ne disposons que de résultats d’examens dans le sang et le foie, alors que, d’après le compte rendu de toxicologie, d’autres avaient été demandés. »

[17] Lorsqu’on l’a transportée aux urgences de l’hôpital Saint Johns de Santa Monica, accompagnée de Ralph Greenson, elle était apparemment encore vivante. L’ambulance aurait fait demi-tour « avec le corps ».

[18] Marilyn Monroe est morte dans la nuit du 4 au 5 août 1962, et, sans que l’on pût disposer d’une heure exacte, malgré la quantité des protagonistes présents à un moment ou à un autre de cette nuit-là, entre 22h30 et 3h du matin.

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